Libérez la recherche

ON VEUT DES SOUS!
C’est en gros ce que quelques thésards ont revendiqué dans deux manifestations, les 7 et 28 juin.
Sont ils à plaindre ? Sont ils mal lotis ? Non pour la première question et oui à la seconde.
Au lieu de réclamer des sous, ils feraient mieux d’apprendre à pêcher (*). Les « thésards » sont les étudiants les plus studieux de notre système nationalisé d’éducation. Ils ont réussi à se hisser jusqu’au plus haut du savoir, ce sont donc des travailleurs hors pair, et à n’en pas douter, des experts dans leurs domaines respectifs.

Une nuance est à apporter tout de même, car je doute que les thésards en économie, en histoire, philosophie et autres disciplines trop « sensibles » soient d’une quelconque valeur, car pour arriver en haut de l’échelle dans ces domaines, il faut s’être soumis au controle étroit des gestapistes cégétistes, des trotskistes entristés (**), et des profs qui ont eux mêmes suivi un lavage de cerveau à l’eau pure de la Moskva (du temps de Brejnev, en Mai 68).

La thèse correspond à la 8ème année d’étude universitaire, ce qui n’est pas mince en terme de formation. Pourtant, à ce niveau là, ils sont toujours des étudiants, dont l’Etat prend en charge les études en compensation de l’implication dans la recherche, elle aussi nationalisée.
Les thésards, loins de remettre en cause ce système absurde, demandent tout simplement plus d’argent. La récente hausse du SMIC (salaire minimum interprofessionnele de *croissance*) les a en effet amenés à devenir… SMICards! Comme beaucoup d’autres qui voient leurs revenus devenir des « bas revenus » au fur et à mesure que ce SMIC augmente (+4% cette année!), les thésards ont donc perdu patience. Cela faisait tout de même… 10 ans qu’ils patientaient! Ahh doivent se dire les ministres.. si tous les électeurs pouvaient être aussi dociles: c’est deux fois la durée d’un mandat de président de la république! 10 de tranquillité électorale!
Un petit 6123FF mensuel est donc tout ce que l’Etat accorde à cette classe d’exploités. Heureusement pour eux, il existe des mécènes autrement plus généreux: MacDonald’s et Quick. En contrepartie d’un travail à temps partiel, 20h par semaine ou moins, les thésards peuvent « arrondir » les fins de mois. Et dans toutes les villes étudiantes, ce n’est pas peu de chose, car la vie y est chère. Et vous avouerez qu’à 26 ou 27 ans on doit commencer à trouver le temps des privations un peu long.
Mais pour les thésards, les 2000FF mensuels qu’ils touchent de leur second employeur, ce serait à l’Etat de leur verser: ils souhaitent une augmentation de 20% de leur allocation, sans contrepartie aucune bien sur. Pourquoi travailler au MacDo, demandons plutôt à l’Etat!

Pourtant si les thésards y regardaient à deux fois, ils arrêteraient certainement de gémir. Dans mon introduction, je demandais s’ils étaient à plaindre. Non! Ils touchent de l’argent pour un travail qui n’est pas évalué par un marché, et qui en conséquence ne vaut rien (j’y reviendrai). S’il n’existe personne pour payer un service, celui-ci est de valeur nulle, quelles que soient les arguments contraires. Alors, s’ils ne sont pas à plaindre, c’est qu’ils sont bien lotis me direz vous: et bien non, car d’autres au sein de ministère, sous couvert de fonds secrets (cf mon article sur les fonds spéciaux, se remplissent les poches de liquide (du cash) non taxé, non déclaré, parfaitement illégal, de l’argent passé presque directement de la poche du contribuable-proie au fonctionnaire-prédateur.
En tant que fonctionnaire, le thésard est donc à plaindre.

Pourtant, ils disposent en majorité d’un savoir valable, et valorisable. Il faut penser aux expatriés qui vont « post-doc » aux Etats-Unis travailler pour de grands labos, collaborer à des recherches universitaires etc. Que vont-ils y chercher, sinon de meilleures conditions de travail, et aussi de vie ? Il serait donc peut être temps pour nous de prendre exemple sur ce pays.
Le meilleur moyen pour ces thésards de voir leur niveau de vie relevé réside en effet dans une totale levée de la tutelle de l’Etat sur l’enseignement supérieur.
Dans un cadre privé, les étudiants devraient financer leurs études. Premier avantage, il y aurait certainement moins de thésards travaillant sur l’excellence du modèle agricole soviétique ou de la pauvreté des communautés paysannes hongroises au 16ème siècle. Quand aux thésards en économie, ils arrêteraient peut être de sortir des études démontrant que l’Etat a été le grand catalyseur du progrès économique tout au long de ce siècle, comme Thomas Piketty voulait nous le faire croire récemment, dans Le Monde.
Deuxième avantage: avec des étudiants qui payent, les universités n’auraient plus besoin de faire l’aumône pour acheter des ampoules de 60W pour éclairer 100 étudiants dans un amphi (NdA: c’est du vécu). A fortiori quand il s’agira d’acheter microscopes électroniques à effet tunnel, ou des supercalculateurs.
Troisième avantage: pour assurer à leurs étudiants que l’investissement dans leur éducation sera rentable, les universités se dirigeront naturellement vers des partenariats avec des entreprises dont la R&D sera partiellement prise en charge. Ce sera tout bénéfice pour l’entreprise, qui financera ainsi à des coûts moindres sa R&D, qui lui donnera une plus grande flexibilité, des horizons ouverts (les étudiants par définition sont en formation et donc plus ouverts). Pour l’étudiant, le contact avec le monde réel sera enfin rétabli, contrairement à aujourd’hui où les chercheurs sont comparés à des « planqués » qui redoutent le travail. Il pourra aussi dans cette affaire trouver une juste rémunération à son travail, sans laquelle il ne pourrait pas vivre et se payer des études longues. Cette rémunération sera forcément « juste » car déterminée par un marché libre. Après tout, un étudiant pourra bien décider de travail avec l’entreprise X ou l’entreprise Y. Et ce qui a été entendu volontairement dans le cadre d’un contrat ne peut être qualifié d’injsute.

Hélas on voit que la demande des 20% va dans un sens totalement contraire au salut des thésards. Etudiants attardés, peut être le sont ils. Idéologiquement attardés, ils ne le sont pas: ils sont à la pointe du « progressisme social ». Dans la lignée des demandes d’allocation étudiante, de prestation indépendance pour les « jeunes » (le futur des victoires électorales, car ils votent peu), eux aussi ont bien retenu la leçon des « syndicats » étudiants. Moi qui croyait que les syndicats n’existaient que dans deux domaines: le crime organisé, et le monde du travail! Mais un syndicat reste toujours un syndicat…
Le ministre de l’enseignement supérieur, pas fou, a quand à lui proposé un aménagement: il y aura plus d’allocataires, surtout dans le domaine des sciences sociales (comprenez socialistes) et il y aura des rustines accollées: développement de cours en faculté, quelques heures par semaine, pour les « moniteurs-thésards ». Voilà qui remplacera agréablement le MacDo et permettra de rencontrer des filles -ou garçons, mais je parle en tant qu’homme pardonnez moi- pour nos thésards.

Dans ce marché de dupes qui se prépare, il n’y aura encore une fois de que des perdants: les universités, les chercheurs, les contribuables. Mais que dis-je ? Tous perdant ? Sauf le ministre bien sûr!

*: Plutôt que de donner un poisson au mendiant apprend lui à pêcher. Je voulais bien sur leur dire qu’un peu de libéralisme ne leur ferait pas de mal.
**: les trotskistes français pratiquent « l’entrisme », autrement dit le noyautage. Le PS, les Verts, mais aussi une myriade d’associations ou d’administrations sont ainsi « entristées ». Cette appellation est toute personnelle et j’aimerai la voir utilisée couramment. Rappel: gauche se dit sinister en latin. Alors se trotskiser peut bien rendre triste!