Scandale de la finance d’Etat

Financement de bulles financières et malversations comptables, c’est le double effet kiss-cool des entreprises bénéficiant de garanties d’Etat. La SEC (l’autorité des marchés US, l’équivalent de la COB en France) a ouvert une enquête sur Fannie Mae, une agence de refinancement des crédits immobiliers, qui couvre l’énorme somme de 1.000 milliards de dollars sur le marché du crédit immobilier (autant que son confrère Freedie Mac). Pour donner des équivalences à ceux qui ne se rendent pas compte de l’énormité de ce genre de chiffre, il faut savoir que celà représente, grosso modo, autant que la dette de la France ou 65% du PIB de la France, qui se chiffre à 1600 milliards d’euros.

WASHINGTON, Sept. 22 – A federal report accusing Fannie Mae, the giant mortgage company, of improper accounting has led to an informal investigation by the Securities and Exchange Commission, the company’s board announced Wednesday. Shares of the company fell $4.96, to $70.69, on the New York Stock Exchange.

With $1 trillion in assets and $53.8 billion in revenue, Fannie Mae ranks as the country’s 20th-largest industrial corporation and is second among the three largest financial institutions in the country, between Citigroup and the Bank of America.

(source: NY Times)
Il faut aussi rappeler que c’est ce genre d’institutions qui refinançant les crédits immobiliers ont contribué à la bulle immobilière.

Financement de bulle et malversations comptables, c’est le double effet kiss-cool des entreprises bénéficiant de garanties d’Etat. Ceci rappelle fortement Enron.
En effet, Fannie Mae a été créée en 1938 en plein New Deal, il s’agit d’une agence semi-gouvernementale, couverte par l’Etat. Au sujet de Freddie Mac et de Fannie Mae, les américains parlent de GSE (governement-sponsored enterprises)

Et si cette institution se trouve en réel défaut financier, et celà l’enquête de la SEC le dira, c’est le marché immobilier qui s’effondre, celà impactera aussi les banques, intermédiaires pour les crédits immobiliers, et par la même une bonne part l’économie.

La FED (banque centrale américaine, équivalent de la BCE) voulant éviter un effet boule de neige, refinancera cette institution avec de la monnaie fraichement imprimée. c’est ce qu’elle avait fait, à la fin des années 90, lors du scandale LTCM, un hedge fund qui faisait des placements à risques à découvert. cette intervention ne manquera pas d’avoir son effet sur l’inflation et sur la santé de l’économie et donc des citoyens.

Et à ce moment-là, ce sera encore vu comme une faillite du capitalisme financier. Alors qu’il s’agit de sociétés semi-étatiques couvrant des risques dans des proportions inimmaginables, et avec des inter-relations entre système monétaire, banquaire et financier entretenues par le monopole du système monétaire étatique.

à ce propos, dans les Echos du 27 septembre, un article sur le projet de faire une « Euro Fannie Mae »:

Bataille autour d’une « Euro Fannie Mae »

L’objet est de créer une « Euro Fannie Mae », une agence de refinancement pour l’ensemble de la place bancaire européenne, sur le modèle des agences américaines Fannie Mae et Freddie Mac. Deux mécanismes seraient instaurés. Soit l’agence achète aux banques leurs crédits immobiliers qu’elle finance par l’émission d’obligations sur son propre nom et se rémunère par une marge d’intérêt. Soit l’agence fait office de véhicule de titrisation pour les banques qui veulent garder leurs crédits immobiliers inscrits à leur bilan, mais en transférer le risque de crédit. Dans ce cas, elle garantirait le paiement des intérêts et du capital aux investisseurs des parts de crédits titrisées, moyennant une commission des banques émettrices.
[…]
La Fédération hypothécaire européenne tire la première. Elle s’attaque à un paramètre essentiel au fonctionnement de l’agence : la garantie de l’Union européenne, dont elle aura besoin pour émettre à moindre coût. Sans elle, les émetteurs auront avantage à émettre sur leur propre nom.

Source : Les Echos
A la vue des performances de Fannie Mae aux Etats-Unis, ce sera un superbe objet financier pour les boursicoteurs européens.

Mais peut-être pas pour le citoyen lambda, qui verra, à terme, son niveau de vie diminuer, son boulot disparaître et des difficultés pour nourrir ses enfants. Et c’est ce que nous pouvons observer depuis que les Etats et les banques ont monopolisés l’instrument de l’échange, la monnaie, dans le but de se financer sur le dos des citoyens. Cet instrument central dans la vie sociale, qui se doit d’être stable dans le temps, se trouve être manipulé rendant le futur de plus en plus incertain. Et celà, augmentant la peur envers le futur, diminue l’horizon temporel des individus. Nous nous trouvons donc dans une spirale inverse de celle qui a vu le sauvage passer au status d’Homme civilisé, processus qui va de pair avec l’allongement de l’horizon temporel.

Ce n’est pourtant pas bien compliqué de comprendre qu’un système qui fait porter les risques sur la collectivité ne peut conduire que vers plus de prise de risque (sans responsabilité équivalente), et donc vers plus de chaos social.

Article de Vincent Poncet.