Police en grève

Il est difficile de ne pas sympathiser avec les policiers. Ne pas être agresser injustement est un des droits fondamentaux de l’individu. Mais au delà de cet élan spontané de sympathie, nous pouvons nous demander si l’on doit encore attendre de l’Etat qu’il assure notre sécurité. Les « mouvements sociaux », sur lesquels se penchent gravement les sociologues crypto-marxistes à l’affût du « progrès social »,sont l’apanage de la France. Nous en avons un nouvel exemple avec l’annonce de la « grève » des policiers et la manifestation qui a eu lieu samedi 10 novembre à Paris.

Encore une exposition des oeuvres du musée français des monopoles publics. Le monopole de l’État des services de sécurité est en faillite. Il est vrai que les hommes de l’Etat ont préféré satisfaire d’autres clientèles, très consommatrices d’assistance publique.

Les droits sociaux n’ont cessé de progresser en cent ans au détriment des services de l’Etat régalien, police et justice. Aujourd’hui, la demande légitime de sécurité ne semble pouvoir être satisfaite qu’en augmentant les dépenses publiques en faveur des Ministères de la justice et de l’intérieur. Et cela sans pouvoir diminuer d’autres dépenses qui sont nécessaires pour acheter les divers groupes d’électeurs à quelques mois des élections générales. On peut donc s’attendre à une prédation fiscale en hausse.

Dans une interview parue sur le site de TF1, le secrétaire régional du Syndicat national des Officiers de Police (le SNOP), nous explique les revendications des policiers et leurs raisons. « Il y a beaucoup plus de violence aujourd’hui. On a franchi un palier dans le non-respect de la police. Là où il fallait deux ou trois fonctionnaires pour intervenir dans une cité, il en faut maintenant le double. A savoir deux véhicules emportant à chaque fois trois fonctionnaires, le premier véhicule « surveillant » l’autre.  »

Il est logique qu’un service étatique et monopolistique ne raisonne qu’en termes de moyens, puisqu’il n’a pas à en supporter les coûts, ceux-ci étant à la charge des contribuables. Bien sûr, les policiers réclament aussi des changements de priorités politiques. Mais ça c’est une mécanique dans laquelle ils ne sont qu’un rouage. Les politiciens procéderont à un calcul coûts-avantages dans lequel les revendications des divers groupes ne sont que des paramètres, des variables qu’il faudra, en temps utile, évaluer au plus juste.

La seule solution, la solution libérale cohérente, est aussi la plus improbable. Le libéralisme classique est incohérent ; il ne nous sera d’aucun secours, puisque ce serait un retour en arrière de demander à l’Etat de se replier sur ses fonctions régaliennes. Il n’y a pas de raisons de penser que la logique de la croissance de l’Etat conjuguée à celle du marchandage démocratique ne nous conduirait pas finalement à la même situation. Non, il faut aller de l’avant et libérer totalement l’ « industrie de la sécurité ».

Privatiser les services de Police et de Justice, c’est possible et c’est même réaliste. Permettre aux individus de se réunir en une multitude de copropriétés qui passeraient des contrats avec des entreprises fournissant des services de police et de justice, ce serait l’accomplissement de la justice par la suppression du vol légalisé qu’est l’impôt et celle du pouvoir discrétionnaire de la bureaucratie. Et pour ce qui est de l’efficacité, il n’y a pas de raisons de penser que les consommateurs et les producteurs, guidés par leurs propres intérêts, disciplinés par la nécessité pour eux de faire les bons choix, créeraient un ordre social moins harmonieux que celui produit par la force des baïonnettes de l’Etat.