l’individu souverain

Pierre Lemieux a lutté de manière héroïque contre les tyranneaux de la Sécurité du Québec pour défendre son statut d’individu souverain. Dans un article de 1945 george Orwell analysait le rôle de la « démocratisation » des armes. Il en faisait une condition de la protection des gens honnêtes contre le pouvoir absolutiste des hommes de l’Etat. lecture de Pierre LEMIEUX.

Je crois que tous les libertariens et libéraux conséquents français devraient se procurer le livre de Pierre Lemieux, « confessions d’un coureur des bois…hors la loi ». D’une part parce que si les individus qui croient en la liberté n’achètent pas les livres qui en font la promotion avec autant de talent il y aurait quelque chose de pourri dans le royaume des libertariens, d’autre part parce que cette oeuvre est d’une qualité exceptionnelle. Elle annonce à la fois la montée en puissance d’une bureaucratie sanitaire et le danger méconnu du désarmement général des individus sous le fallacieux prétexte de la protection des honnêtes gens. C’est en fait tout le contraire que nous décrit Pierre Lemieux au travers du compte rendu savoureux de ses démêlés invraisemblables et kafkaïens avec les tyranneaux de la Sûreté du Québec.
Le combat pour la liberté passe par une dénonciation du désarmement des citoyens car il profite aux vrais criminiels et criminalise les honnêtes gens désireux de se protéger contre les prédateurs et contre les déficiences de l’Etat en matière de sécurité. Mais il permet aussi d’asseoir l’absolutisme de l’Etat dont la Police, seule à pouvoir être armée, est d’abord la garde prétorienne.

Pierre Lemieux cite cette loi de Virginie incroyablement actuelle datée pourtant de 1785: « Nul esclave ne pourra détenir d’armes, ni en transporter si ce n’est avec une autorisation écrite de son maître ou employeur ou en sa compagnie. » Admettez les identités esclave=citoyen et maître=hommes de l’Etat et soudain vous prenez conscience de l’esclavage volontaire que les citoyens des pays démocratiques ont petit à petit accepté et même rationalisé, justifié, sous l’effet d’une propagande d’Etat contre les armes à feu.

Nous nous sommes habitués, sous les influences de la tradition libérale de l’Etat veilleur de nuit et plus encore de celle de l’Etat social, à penser l’Etat avec trop d’angélisme. Si l’Etat bienveillant garantit notre sécurité il faut lui accorder le monopole de la possession des armes, ainsi la sécurité publique sera-t-elle assurée au mieux. On voit bien aujourd’hui que cette mission de l’Etat est un échec retentissant. Si les honnêtes gens pouvaient défendre leur peau et assumer leur statut bafoué d’individu souverain, la criminalité n’atteindrait pas ces sommets. Car les lois prohibitionnistes profitent toujours aux vrais criminels, ceux qui agressent les droits des autres pour vivre.
Comme l’écrit Pierre Lemieux: « le hic est que les armes servent aussi à la légitime défense et à dissuader les agressions criminelles. Il n’est pas étonnant que des études crédibles montrent que la disponibilité des armes pour les honnêtes gens réduit le nombre net de crimes violents. » et l’auteur poursuit en posant une question vraiment cruciale: « Comment expliquer cette préférence perverse de l’Etat pour la sécurité des criminels plutôt que pour celle des honnêtes gens?  »

La réponse est très grave et n’apparaît jamais à la surface du débat. Il faut vraiment remercier Pierre Lemieux de rappeler la raison profonde du désarmement des citoyens: écarter les risques de rébellion et garantir le pouvoir des hommes de l’Etat. « L’Etat déteste le sentiment de souveraineté individuelle que favorise la possession d’une arme. Et si l’Etat avait peur de ses sujets au début du 20e siècle, alors que les rumeurs de révolutions servirent de prétexte aux premiers contrôles généralisés, il les craint bien davantage à l’aube du 21e. Et pour cause, car une minorité n’aimera pas du tout ce qui s’en vient. »
Dans la « formation obligatoire » que Pierre Lemieux voudrait voir imposer aux candidats politiciens, « on raconterait aux élèves comment, en 1689, Jacques II, roi d’Angleterre, dut son salut à sa fuite en France après que lui et son prédécesseur eurent notamment désarmé leurs sujets sous prétexte de contrôler leurs droits de chasse. »

« Et ils ignorent que les épées sont données afin que personne ne soit esclave » (Lucain, De Bello Civili, cité par Pierre Lemieux)

lecture de GEORGE ORWELL

Le contrôle des armes c’est le contrôle des individus et le champ libre à la tyrannie étatique. Voilà en résumé ce que dit Pierre Lemieux. Eh bien j’ai été stupéfait de lire un article incroyablement perspicace de Orwell qui rejoint cette conclusion. Le dernier tome (IV) de la monumentale édition des « Essais, articles, lettres » de George Orwell vient de paraître aux éditions IVREA. Voici quelques extraits de l’article « la bombe atomique et vous » daté du 19 octobre 1945.
« […] C’est un lieu commun que d’affirmer que l’histoire de la civilisation est dans une large mesure celle des armes. (…) Les époques où l’arme dominante est coûteuse ou difficile à produire tendent à être des époques de despotisme, alors que, lorsque l’arme dominante est simple et peu coûteuse, les gens ordinaires ont leur chance. C’est ainsi, par exemple, que chars d’assaut, cuirassés et bombardiers sont par essence les armes d’une tyrannie, tandis que fusils, mousquets, arcs et grenades sont celles d’une démocratie. Une arme complexe renforce le pouvoir des puissants, alors qu’une arme simple permet aux plus faibles- aussi longtemps qu’elle est sans réplique- de se défendre bec et ongles.
(…) En 1939, il n’y avait déjà plus que cinq Etats capables de livrer une guerre à grande échelle, et il n’y en a maintenant plus que trois – et peut-être seulement deux en définitive. (…) Le seul élément qui pourrait inerser cette tendance serait la découverte d’une arme – ou, d’une façon plus générale, d’une méthode de combat – qui ne dépendrait pas d’une énorme concentration d’installations industrielles.
(…) Si la bombe atomique s’était révélée aussi peu onéreuse et aussi facile à produire qu’une bicyclette ou un réveil-matin, elle aurait fort bien pu nous replonger dans la barbarie, mais elle aurait pu tout aussi bien signifier la fin de la souveraineté nationale et de l’Etat policier hautement centralisé. Si elle est, comme il semble que ce soit le cas, un objet rare et coûteux aussi difficile à produire qu’un cuirassé, il est plus vraisemblable qu’elle ne mettra un terme aux conflits à grande échelle qu’en perpétuant indéfiniment une « paix qui n’est pas la paix » « .