L’arrivée de l’Euro marque une nouvelle étape dans la construction européenne ou plutôt dans une zone économique intégrée. Bien sûr, ce véritable marché unique reste imparfait : les lois et les fiscalités restent tellement dissemblables que les entreprises devront probablement continuer de raisonner pour beaucoup au niveau des états. Alors que l’harmonisation des législations nationales se révèle pour l’instant impossible, verra t’on un jour un état européen ? Doit-on le craindre ? L’Euro sera t’il l’ennemi des libéraux, débouchera t’il un jour sur un état européen ? En toute objectivité, je ne pense pas que cela soit possible. L’Euro est l’achèvement de la construction européenne : sa plus grande réussite. On peut aujourd’hui compter sur celui-ci pour en être sa dernière grande réalisation : celle qui va transformer l’union européenne en une zone de « libre échange » pure et simple. Les états actuels sont trop soucieux de leurs intérêts propres pour parvenir à une quelconque harmonisation des législations nationales. Certains, comme le gouvernement français actuel, sont même totalement irresponsables et ne pensent qu’à leur réélection. Même les peuples les plus pro-européens (ce qui touche le plus d’argent en l’occurrence) ont du mal à accepter d’aller plus loin : les Irlandais n’ont-ils pas dit non par référendum à la ratification du sommet de Nice ? Il faut dire que l’entrée de nouveau pays dans l’Europe (beaucoup plus pauvres) les auraient privés de moultes subsides.
L’harmonisation des fiscalités, n’est pas à l’ordre du jour. On parle en ce moment plus de concurrence fiscale ce qui semble pour l’instant amener les pays à haute fiscalité à baisser leurs taux d’imposition (La France suivra t’elle l’Allemagne ?) L’harmonisation des législations relève du casse tête : il aura fallu près de cinquante années pour parvenir à mettre au point une Société Européenne (de type SA) qui fait encore la part belle aux législations nationales. La directive européenne sur les OPA a été rejetée après des années de négociations. Pour entraver la construction d’un état européen, on peut compter sur « les constructivistes de tous partis et de toutes origines intellectuelles » prompt à défendre leurs intérêts qu’ils l’assument ou mettent cela sur le compte de la justice sociale. On peut compter sur les lobbies pour gangrener le but final de la construction européenne ainsi que les états et donc pour les discréditer aux yeux de chacun.
N’appliquons pas le principe de précaution à l’Euro. Il n’est ni bon ni mauvais, ce n’est qu’une simple monnaie, tout dépend de ce que l’on en fera par la suite. Il n’y a pas lieu d’être trop pessimiste. Au niveau français, l’Europe est même une très bonne chose (tout comme le conseil constitutionnel) pour tempérer la discrimination sociale que certains voudraient imposer. Ne regrettons pas les monnaies nationales comme les flux fervents défenseurs de l’état de droite comme de gauche, une société plus libre n’a pas besoin de telles frontières. Je ne partage pas ici le point de vue de ceux qui pensent qu’il faudrait laisser les monnaies nationales cohabiter avec l’Euro pour mieux pouvoir s’en retirer. Non seulement cela créerait certainement un effondrement de la monnaie nationale sur le marché des changes mais les taux de la BCE sont très favorables pour beaucoup de pays européens dont les monnaies étaient faibles dont le nôtre. Les gouvernements devraient prendre leurs responsabilités (les journalistes devraient réfléchir) au lieu de brocarder la BCE. On ne va pas me dire que des taux à 3,5% bride la croissance ! C’est vrai que 3 ou 3,25% changerait tout. La vraie solution réside dans ce que j’appellerais « une désintermédiation étatique » : dissocier le plus possible état et économie, réduire la pression fiscale et recentrer l’état sur les fonctions régaliennes qu’on lui attribut serait déjà un bon début…