Le point sur l’UE

Samedi dernier, les Irlandais ont dit « oui » au traité de Nice. L’Union Européenne, qui se confond désormais avec le vocable « Europe », va donc s’agrandir. Plus d’Etat, plus de lois, plus de subventions, plus d’impôts. Que peut-on attendre d’autre ? Ah oui, de la propagande dans les médias…
La démocratie foulée aux pieds

Détrompez vous, je ne vais pas prendre la défense de la démocratie. Simplement, quand en permanence on se proclame démocrate comme tous les politiciens européens, on ne foule pas aux pieds le résultat d’un référendum tenu il y a à peine 16 mois. Et pourtant, avec le référendum bis tenu en Irlande c’est bien ce qui vient d’arriver. Ils avaient mal voté, qu’à cela ne tienne: ils revoteront: « obéissez aujourd’hui ou obéissez demain », comme l’écrit Turion.

Heureusement, cette fois ils ont eu « bon ». D’ailleurs sur France Infos, j’ai pu entendre, lors de ma contribution à la santé publique (1), qu’une fois les peuples « bien informés« , ils prenaient de « bonnes décisions« . Dans les termes de Pat Cox, président du Parlement Européen: « La classe politique n’a pas pris la peine d’expliquer les enjeux. Résultat : le camp du « non » a pu faire ce qu’il a voulu« . Il est vrai qu’après avoir modifié le code électoral pour être certain que seuls les pro-traité de Nice s’exprimeraient dans les médias, et changé la question pour la rendre cornélienne pour les anti-Nice, le camp du non n’avait plus une très grande latitude d’expression (3). La déclaration de Pat Cox constitue juste l’aveu naïf du mépris du peuple par les politiciens.

Avec l’élargissement désormais certain, le jeu complexe des propotions des pays de l’Union Européenne dans le Parlement et au sein de la Commission va être chamboulé. Combien de sièges vont échoir aux nouveaux entrants? Qui va perdre des voix? Et la Commission? Doit-elle s’aggrandir pour que chaque pays ait un commissaire? Là encore se posent de graves problèmes pour les champions de la démocratie! D’où l’on peut imaginer d’intenses négociations, les petits pays n’ayant pas envie de subir les dictats des grands, les grands n’ayant pas envie de faire face à une coalition de petits non plus. A ce jeu là un électeur Hollandais vaut nettement plus qu’un Allemand ou qu’un Français, mais moins qu’un Luxembourgeois ou qu’un Danois. Un exemple ? L’Allemagne a 8% des sièges au Parlement, contre 2% pour l’Irlande, 20 fois moins peuplée. Allez expliquer ça aux Européens maintenant. Ce qu’il y a derrière toutes ces manigances, ce sont simplement des clés de répartition de postes entre hauts fonctionnaires: donne moi la commission machin je te donne le comité truc! L’emballage « politique » des « petits » et des « grands » pays n’est là que pour permette aux journalistes de faire un papier. Après tout, pourquoi ne pas dire qu’au lieu de grand et petit pays on parlera désormais des pays du Nord et du Sud ? L’opposition latine/anglo-saxonne ? Ou mieux: réformistes et papistes!

Si de tous les pays européens, seuls les Irlandais ont voté sur le traité de Nice, tous les autres pays l’ont déjà ratifié au travers des Parlements. Pour l’information du citoyen, il va encore falloir attendre, alors voilà ce que j’ai pu glaner sur ce traité mystérieux: fin du droit de veto sur 39 sujets, défense européenne, politique extérieure européenne, élargissement, future constitution… Les journaux restent relativement vagues sur le contenu réel, préférant surtout parler de la « convention sur l’avenir de l’Europe » de Giscard d’Estaing. Elle fixera les modalités de prise de décision collective à 25. Requérir l’unanimité à 15 c’est déjà difficile, à 25 ce sera impossible. Comment alors prendre les décisions essentielles sur « les brevets communautaires? La régulation des marchés financiers? » (dixit Romano Prodi, président de la Commission Européenne). En tant que libéral acharné, je me le demande aussi, et j’espère ne jamais avoir de réponse. Il est évident cependant qu’elle sera trouvée un jour la solution miracle: celle qui contentera chaque fonctionnaire politicien, qui permettra à tous de trouver son bonheur dans les nouveaux palais de Bruxelles. Ce jour là on peut s’attendre à une nouvelle déferlante de lois. Il paraît que chaque année 60% des nouveaux textes législatifs français sont en fait issus de Bruxelles. Le jour où il deviendra « simple » de prendre une décision, combien de lois arriveront quotidiennement de Bruxelles ?

A court terme, rien ne devrait réellement changer pour l’Européen moyen, pas même sur le plan financier. Comme toutes les structures étatiques elle sera relativement indolore dans les premiers temps, pour les pays de l’UE. Elle sera peut-être même bénéfique, avec les provisions du traité sur la mise en concurrence de « services publics ». Mais il faut aussi que les pays entrants dans l’UE se mettent à niveau: ils doivent adopter les lois européennes, y compris sociales, fiscales etc. Imaginez demain les Hongrois avec les normes sociales européennes: 35heures ? Sécurité sociale ? Qui sait ce qui va leur tomber dessus et grever leur compétitivité ? Et les agriculteurs Polonais ? Face aux Bretons subventionnés, que deviendront-ils ? Eux aussi seront pris sous la déferlante lointaine des textes bruxellois. Ils connaitront aussi le calibre idéal des patates, la composition exacte du chocolat, et le temps de travail normé d’un chauffeur de poids lourd. A cette aune là, les nouveaux venus risquent bien vite de regretter l’entrée dans l’UE.

Ce, d’autant plus qu’ils croyaient toucher le pactole européen: la Politique Agricole Commune ne sera pas étendue, et d’ores et déjà la Tchéquie, Malte et Chypre seront contributeurs nets au budget, dès la première année! Ils subventionneront les pays concurrents, dans la plus grande joie on l’imagine. Le magot ira aux autres pays: 40 milliards d’euros pour intégrer la Pologne, la Hongrie, la Slovénie, la Slovaquie, et les Etats Baltes. Avec le désastre économique qui se profile, entre les lois européennes qui étoufferont les entreprises viables et les subventions qui iront nécessairement soutenir des industries qui devraient mourir, le budget européen restera-t-il stable ? Rien n’est moins sûr, même si pour l’instant le budget européen est plafonné à 1.27% du PIB des 15. Toute bureaucratie est destinée à croitre, surtout en cas de crise: rappelez vous cette loi d’airain de l’action gouvernementale: « plus on est inefficace, plus on a de budgets ». C’est bien connu, dans une faillite étatique, ce n’est jamais le mode d’action qui est en cause, c’est le manque de moyens.

Tout est donc en place pour un futur désastre à l’échelle européenne: monnaie unique, Super Etat incontrôlable, Commisssion qui ressemble plus à un Politburo, des institutions toutes redondantes avec celles des pays membres… Bientôt viendra le moment de faire un budget européen, et donc un impôt européen pour financer les catastrophes: défense, justice européenne, subventions en pagaille. Le « pacte de stabilité », supposé garantir la valeur de l’euro en obligeant les Etats nationaux à avoir des budgets équilibrés a volé en éclat dès la première année de l’euro, et l’on devrait croire que les plans et les traités futurs vont être respectés ? Il n’en est rien évidemment: les budgets seront toujours dépassés, les hommes politiques salivent déjà de gourmandise en rêvant des milliards à venir, aux postes à pourvoir dans toutes les institutions, aux multiples fêtes et déplacements, comités et réunions de travail, tandis que les têteux de subventions alléchés multiplieront les courbettes devant les nouveaux seigneurs.

En attendant la propagande continue tous les jours dans tous les journaux. A cet égard, je conseille tout particulièrement France Infos, radio d’Etat, qui au travers de 3 chroniques donne une bonne idée de l’enfer qui nous attend avec l’Union Européenne. 1: en clair, je faisais un jogging.
2: Propos recueillis par Le Monde
3: voir à ce sujet « They rigged the rules, then the question » de Daniel Hannan pour The Telegraph
The Telegraph.co.uk