Jacques CHIRAC, en campagne électorale au salon de l’agriculture, a une fois de plus manqué une occasion de se taire. En critiquant avec virulence les scientifiques de l’AFFSA, c’est le Président qui a commis une « faute de goût ». Passons sur le ridicule du propos: les scientifiques n’ont fait qu’appliquer à la lettre le principe de précaution (principe mauvais s’il en est, mais il s’agit d’un autre débat), dont le même CHIRAC était encore il y a quelques semaines le défenseur zélé.
Le caractère extrêmement choquant de ces propos est ailleurs, il réside dans le principe même de cette attaque.
Comment un homme politique, à plus forte raison le chef de l’Etat, peut-il oser demander à des scientifiques de se taire tant qu’ils n’auront pas la certitude de la véracité de leurs resultats?
Comment oser demander publiquement, devant des millions de français concernés au premier chef, à des scientifiques de ne pas parler pour ne pas créer de psychose?
« N’effrayez pas le petit peuple en lui disant la vérité… »
Que les déclarations de l’AFSSA soient justes ou non, qu’elles soient fondées ou farfelues ne change strictement rien au problème. Le problème, grave, est que nous venons d’assister à une scène inquiétante: le Président de la République donnant des ordres à des scientifiques (car le ton employé était plus celui du commandement que celui du conseil amical). Peut-être est-il illusoire de parler d’indépendance dans le cas de l’AFFSA, organisme public, mais une telle tentative de subordination de la science au politique est très grave. Pourquoi demain, le pouvoir politique n’interdirait-il pas la publication de livres, de journeaux ou de revues sous pretexte qu’ils pourraient inquiéter leurs lecteurs?
L’Histoire est jalonnée de périodes sombres au cours desquelles le pouvoir politique a essayé de faire taire les scientifiques…
Les scientifiques de l’AFSSA sont aux ordres, comme les scientifiques de l’ONU (cf article précédent « L’ONU réchauffe la planète ».
Il est très simple pour le pouvoir politique de réduire au silence les scientifiques de ce fait.
Si l’AFSSA a pu s’exprimer sur ce sujet c’est parce que Lionel Jospin et Jacques Chirac sont en campagne présidentielle, sinon on peut parier que le consensus aurait joué et alors, zéro avertissement….
D’autre part, il faut voir dans cet avertissement le côté centralisé de la prise de décision en matière sanitaire: comme pour le sang contaminé, en laissant la décision à une instance unique et politique, on peut être sûrs que les motivations ne seront pas basées sur des critères pertinents: échécances politiques, clientélisme etc…
D’autre part, si une catastrophe doit se produire c’est forcément à grande échelle, et la responsabilité étant « politique », il n’y aura jamais de procès ni de coupables!
Laissons donc les entreprises et les gens décider, car ce n’est que dans des structures de marché libres que la qualité peut émerger!