Sexe: une affaire privée

L’Etat est garant suprême de la moralité. Les hommes de l’Etat, dans leur blancheur immaculée doivent nous protéger de nos excès.
En matière de sexe, cela passe par la criminalisation de la prostitution. Etat des lieux et vision libertarienne. La prostitution est un sujet délicat, tout comme la drogue, c’est un sujet qui déclenche polémiques sur polémiques.

La position libertarienne est claire sur ce sujet: il existe des adultes prêts à payer pour obtenir ce service d’autres adultes consentants. Dans ce cas, pourquoi interdire l’échange ? Du point de vue théorique, il n’y a rien de choquant: deux personnes libres s’échangent un service contre de l’argent. Un acte économique courant en somme.

Moralement, on peut y trouver à redire. L’acte n’est pas spécialement « beau ». Louer son corps est quelque chose de relativement répugnant à mes yeux. Et avoir une relation sexuelle avec une personne pour de l’argent, sans amour, est un exercice bestial, au sens propre du terme. C’est vraiment un exercice peu ragoutant, et tel qu’il est pratiqué maintenant, il est même dangereux, sale… C’est un acte vil

Mais nous vivons dans une société socialiste, démocratique de surcroît, et il existe donc des règles que l’on doit à la majorité, au bon vouloir des princes, aux lobbys… bref à tout sauf au Droit tel que l’entende les libertariens.

Comme pour le commerce de la drogue, les mêmes causes produisent les mêmes effets: en France la prostitution est interdite. Il existent des lois qui « répriment le proxénétisme, sanctionnent le racolage et prêchent la prévention et la réinsertion ». Les mêmes lois sont en vigueur en Finlande, au Portugal, en Italie, en Espagne. Il existe un « courant réglementariste » qui prône une « troisième voie » pourrait-on dire. Les réglementations concernent la prostitution « libre », sans « maq » (les maquereaux, les gardiens des prostituées).
Ainsi en France, l’Etat touche sans vergogne des impôts sur les activités des prostituées alors qu’au nom de la dignité humaine elle est vigoureusement condamnée.

Dans ces pays dits « abolitionnistes », en référence à l’esclavage, la situation est critique. A Strasbourg par exemple: « en cinq ans, 700 filles de l’Est sont passées par la ville. Elles n’étaient qu’une poignée en 1995, et sont désormais une cinquantaine chaque soir à arpenter le pavé. ». Il y a donc eu une véritable explosion de ce marché dans les 5 dernières années, malgré la police, malgré les amendes et la prison. Les victimes ? Des jeunes femmes venues des pays de l’Est. Tous les soirs, elles reversent le produit de leur corps à des proxénètes allemands, de l’autre coté de la frontière.
A Lyon, c’est la guerre au Kosovo qui a amené des concurrentes difficiles aux prostituées locales, à telle point que celles ci s’en plaignent: « La tension monte sur les trottoirs lyonnais après l’avalanche de lettres envoyées au préfet et au procureur par les prostituées locales, pour protester contre la concurrence «déloyale» des filles de l’Est ». Et bien sûr, cpmme sur tout marché, se posent des problèmes de qualité de service, en des termes on ne peut plus crus: « « Â«Jeunes et jolies, tout ce que le client aime», note-t-elle – Claire s’est sentie menacée. «Elles proposent des tarifs quatre fois moins élevés que les nôtres!» ». Les prix aussi sont menacés! Ah, la mondialisation! Mais ce n’est pas tout: « En fait, cette pétition n’est qu’un symptôme de la crise qui frappe le milieu depuis plusieurs années: la clientèle de rue a diminué, la profession s’est masculinisée et les salons de massage se sont multipliés ». Bref, c’est un vrai marché, et il semblerait que tout simplement les « putes » ne soient plus au gout du jour. Mais là encore, si le côté ridicule est bien présent, la violence aussi: les albanaises débarquées du Kosovo ont des macs, et ceux-ci tentent de déloger les anciennes des rues pour imposer leurs « protégées ». Quand le marché est hors la loi, pourquoi respecter un quelconque droit ? Et les albanaises sont de véritables esclaves aussi, aux mains de leurs macs.
Quand à la situation de Paris, je vous conseille d’aller directement lire l’article de l’Express, édifiant.

En France donc, la prohibition ne porte pas ses fruits: les macs rendent les filles esclaves, il y a des guerres de gangs, de la drogue et du trafic de femmes. Tout ce que l’on voulait éviter est là.
Loin de s’en apercevoir, une ancienne prostituée suisse interviewée par l’Express prend une position anti-légalisation, et la justifie par le fait que peu de prostituées exercent leur métier volontairement. Tout à fait normal, puisque le trottoir étant public, pour racoler il faut un mac qui assure un territoire. Celui-ci fait appel à la violence pour régner sur une portion de ville, de rue. Et les filles qui travaillent là doivent lui obéir. Mais qu’advient-il si le métier est libre ?
En France, c’est l’idéologie qui règne avec la position anti-légalisation représentée par une chercheuse au CNRS: « Dans la prostitution, tout part du postulat que le désir masculin doit être satisfait en toutes circonstances ». Encore l’opposition hommes/femmes, c’est un nouveau combat pour la libération de l’oppression masculine. Parce que sa position n’est pas tenable, elle l’assortit d’une grande idée socialiste, l’éducation de la masse. Il faut éduquer dès le plus jeune age à la différence entre les sexes et au respect!

La solution est plutôt à chercher du côté de la Belgique, où les prostituées peuvent exercer en toute liberté: là bas elles ont des maisons closes, où les clients ne peuvent pas les battre, ou les macs ne leurs prennent pas 50% de leurs revenus.
Puisque le métier n’est pas un crime, acheter le service non plus. Les utilisateurs, pour autant qu’on puisse détester leur geste, le font sans crainte, même si je pense que la honte ne les quitte pas.

Dans ces pays les filles ont quitté les trottoirs pour les vitrines. Mais il faut aussi noter que même les hommes se louent aujourd’hui. Ce qui indique par ailleurs à notre française du CNRS que ce n’est pas une affaire homme/femme.

Après tout n’est plus qu’affaire de moeurs: si les femmes ou les hommes veulent vendre leurs services et que d’autres sont prêts à les acheter… Pourquoi pas ?